Un ou des confinements ?
Si le premier confinement a pu laisser une impression mixte entre nouveauté, repos, découvertes ou pause dans sa vie, il a aussi été vecteurs d’angoisses, pertes, doutes et perplexité.
Le retour de l’été, des vacances, mêmes accommodées ont, ensuite, pu redonner le sentiment de reprendre sa vie, au-delà du virus, la maladie, la mort.
Ce second confinement a pu nous prendre par surprise mais il a surtout activé ou réactivé une perte immense de contrôle sur les choses, sa vie, ses projections.
Deuxième confinement : 2ème vague à l’âme ?
Ce que beaucoup de psychologues ont constaté, et je me compte parmi eux, c’est une détresse immense face à une situation incontrôlée et incontrôlable.
Il y a longtemps que l’humain a (l’illusion) le sentiment de maîtriser son environnement social écologique, économique, médical et familial.
Il peut presque se targuer de concurrencer la nature et ses lois depuis près de 100 ans.
La situation actuelle est exceptionnelle.
Plus encore dans un pays comme le nôtre, symbolisant la liberté et ses combats.
En effet, nous voilà, à nouveau, privés d’agir et d’aller où et quand bon nous semble, de nous croiser, nous frôler, nous toucher, nous découvrir et même nous aimer.
Chaque personne représente un danger, un risque et c’est tout un modèle de lien social qui perd de sa superbe.
A cela, il est important d’ajouter un paramètre nouveau qui enferme tout ce que nous avons construit au fur et à mesure de notre évolution historique : l’absence relative de projections.
Si les premiers bipèdes ont foulé la planète entière, c’est avec la conviction intime d’un monde meilleur et/ou d’une curiosité à toute épreuve.
Ici, dans notre contexte actuel et, avec ce contrôle sur le temps certes illusoire, l’humain a presque l’impression de son immortalité.
Avec elle, ou en tous cas, cette longue vie centenaire, nous projetons en permanence : un achat de maison sur 20 ou 30 ans, des vacances ou un long voyage dans 2 ans, des naissances et autant de cérémonies ou fêtes spécifiques, une mutation, une promotion…
Depuis que le confort existe, le futur est présent !
Et voilà que nos perspectives se ferment pour ne représenter qu’une poignée de jours !
Il est demandé d’attendre, de rester en retrait de sa propre vie, de regarder un monde sans y participer ou a minima.
Comme en équilibre, statu quo et arrêt dans l’espace et le temps, nous ressentons, respirons et pensons pourtant.
Tous ces progrès devaient nous permettre de dépasser, transcender la question même de notre utilité au monde.
En devenant passifs/ves, nous sommes contraint.e.s de repenser notre présent mais sans pouvoir projeter un avenir.
Présent subi, un peu comme dans une salle d’attente où tout s’éternise.
A la merci de politiques, de discours médicaux plus ou moins contradictoires et d’une science qui ne sait pas, les avis, les échanges, les décisions soulèvent doutes, peurs et inquiétudes diverses.
Le premier confinement et son enfermement avait développé des troubles et des angoisses bien définis, connus.
Celui-ci agit comme une chappe de plomb écrasante, mortifère sous laquelle la survie psychique va dépendre de son activité économique, d’une heure quotidienne pour s’aérer ou un sourire de son enfant.
La question de l’essentiel sur des biens de consommation soulève celle sur ce qui l’est dans sa vie propre sans avoir le moindre levier d’action.
Et, c’est là que les difficultés voire les souffrances se figent :
– Sans action sur sa vie, comment avoir le sentiment de la contrôler ?
– Et que faire du concept même d’avenir sans une vision même à court terme ?
– Comment projeter « une vie d’après » quand on n’a pas même un minimum de sens sur ce même « après » ?
On fait quoi dans tout ça ?
Aujourd’hui, la stabilité de la santé mentale réside en une construction ou reconstruction de choix basiques.
Il faut arriver quotidiennement à se rattacher à un plaisir personnel.
Parce que nous sommes tous dans une prison mentale, chaque moment positif, chaque instant de bien être compte.
Puisque je ne peux pas me raccrocher à mes projets de vacances au soleil, je revis mes dernières vacances en replongeant dans mes photos, en montant un film etc.
Le soir, le matin, je ne me contente pas de faire du pain ou de me glisser devant un film, une série, je prends la mesure de mon ressenti, je le reçois et
je l’accepte sans y voir une fatalité uniquement.
Si je veux retrouver un tant soit peu de contrôle sur et dans ma propre vie, il faut que je puisse « m’approprier » cette nouvelle donnée.
« Je fais du mieux que je peux mais je fais »
Et pour cela, en plus de rester bienveillant.e envers moi-même en gardant cette phrase « je fais du mieux que je peux » à l’esprit, je reste actif/ve dans cette démarche.
Il est essentiel de prendre en compte ses envies « confinées ».
Aujourd’hui, j’ai envie de quoi ?
Gardons cette question comme moteur de nos jours.
Constater que je ne peux pas le faire avec amertume et ruminer son impuissance ne doit pas excéder quelques minutes.
Une fois que j’ai pu prendre la mesure de l’impossible, je m’invite à regarder autour de moi ou en moi et je trouve un objectif agréable.
N’est-ce pas ce que nous suggérons aux enfants qui s’ennuient un jour de pluie ?
Je ne serai pas, comme au premier confinement, partisane de seulement s’ancrer dans le moment présent puisque c’est bien lui qui pose problème.
Je me permettrais seulement de conseiller une écoute active de soi et de tenter de s’adapter à des activités qui m’entourent que ce soit des plaisirs oubliés comme du coloriage ou des nouveautés comme la découverte de la musique inuite !
Si vous avez besoin de râler, de pleurer, de douter ou de chanter vos tubes d’adolescent.e, ne vous privez pas !
Evacuez, rendez-vous vivant.e et retrouvez vos émotions premières.
Celles-ci, rien ni personne ne peut vous les prendre.