Comprendre l’éco-anxiété
L’éco-anxiété est un phénomène émergent de notre ère moderne qui fait écho à une réalité alarmante : les effets dévastateurs du changement climatique et de la dégradation de l’environnement deviennent des sources d’angoisse pour de nombreuses personnes à travers le monde.
Huit Français sur 10 se disent inquiets face au changement climatique, d’après le rapport annuel du Conseil économique social et environnemental (CESE) sur l’état de la France.
Les premiers résultats de l’étude réalisée par l’Observatoire de l’Eco-Anxiété (OBSECA) montrent que 75% des Français sont évalués comme “éco-conscients”. Ce terme désigne « l’ensemble des personnes concernées par les enjeux environnementaux ».
5% des répondants à l’étude sont très fortement éco-anxieux. Ces personnes « ruminent en permanence les mauvaises nouvelles relatives à l’environnement et cela affecte leur quotidien, à la fois dans leurs relations avec leur entourage et parfois leur sommeil » , explique On Est Prêt.
Aujourd’hui considérée comme par beaucoup comme une « maladie des jeunes », il est essentiel de comprendre au contraire que cela n’est nullement une maladie ou un trouble psychique mais bien un mal concret qui se développe face une réalité double:
– la destruction progressive de nos écosystèmes
– l’inaction des pouvoirs publics comme des populations.
Cette prise de conscience crée une véritable vague émotionnelle qui percute la pensée (face à la dissonance entre réalités et inactions).
Un adolescent français sur deux souffre de symptômes d’anxiété ou dépressifs
La totalité des indicateurs de d’anxiété mesurés grâce au test clinique du type GAD7 sont en hausse en 2022 :
l’irritabilité (66%, +5 points par rapport à 2021), l’anxiété (66%, +6 points), l’inquiétude (59%, +10 points), l’incapacité à arrêter de s’inquiéter (49%, +8 points), la peur que quelque chose de terrible leur arrive (43%, +9 points) ou encore l’agitation et l’incapacité à tenir en place (43%, +8 points).
53% des adolescents en France sont touchés par des troubles de l’anxiété.
Une augmentation de 10 points par rapport à 2021.
47 % des adolescents sont stressés par l’état de la planète et la nature (le réchauffement climatique, les tempêtes, les espèces en voie de disparition, etc.)
Ceci est à ajouter aux 43% de la population mondiale préoccupée par le changement climatique et 30% qui déclarent ressentir de l’angoisse en pensant à ce changement climatique.
Les bilans, rapports font état actuellement d’effondrement.
Les politiques mondiales, européennes et nationales étant dans une dynamique de déni et d’évitement notamment depuis le COVID, les troubles anxieux sont de plus en plus marqués dans la population entière.
Les manifestations de l’éco-anxiété :
Les personnes souffrant d’éco-anxiété peuvent éprouver une gamme variée de symptômes, allant de l’anxiété et de la dépression aux troubles physiologiques tels que les maux de tête et les troubles du sommeil.
De plus, l’éco-anxiété peut se manifester par des états de stress importants avec des pensées mortifères et des comportements parfois à risque dans l’engagement, la prise de décisions…
L’éco-anxiété ne se manifeste pas uniquement par de l’anxiété, mais aussi par une large gamme d’émotions, dont les principales sont la colère, de la culpabilité, de la tristesse, un sentiment d’impuissance, etc.
Certaines personnes sont aussi envahies par la solastagie: c’est un sentiment de profonde tristesse face aux transformations, agressions vécues ou constatées contre leurs environnements directs et indirects et auxquels elles sont attachées.
Prise en charge de l’éco-anxiété:
Comme évoquée plus haut, l’éco-anxiété n’est pas une maladie mais elle peut créer de tels effets anxiogènes ou envahissants que la thérapie devient essentielle.
D’abord pour entendre et se sentir soutenu.e, compris.e, entendu.e.
Pour se faire, il est conseillé de s’adresser à des professionnel.les non seulement sensibilisé.es à la question mais aussi en mesure de répondre à cette demande spécifique.
Vous trouverez notamment le Réseau des professionnels de l’Accompagnement Face à l’Urgence Ecologique (RAFUE) dont je suis fière de faire partie.
Ce groupement permet de continuer à évoluer, réfléchir et proposer des suivis de qualité dans le respect et les besoins des personnes.
Beaucoup se sentent jugé.es et leurs souffrances minimisées.
L’éco-anxiété se rapproche d’un deuil environnemental.
Avec la destruction de la biosphère, nous assistons en effet à la perte, visible ou anticipée, d’un environnement aimé et habité. Qui plus est, cette perte est irréversible, la dégradation de la biosphère étant sans retour possible. L’éco-anxiété se nourrit donc d’un constat tragique sur lequel la communauté scientifique ne cesse de nous alerter : nous ne retrouverons jamais le monde d’hier.
Comment ne pas sombrer alors dans un sentiment d’impuissance, dans une rumination sans fin ? À quoi bon poursuivre nos projets dans un monde incertain ? À quoi bon concevoir des enfants ? À quoi bon vivre ?
Tout ceci est bien réel et nécessite de pouvoir être entouré.e.
Eco-anxiété: une thérapie dedans et des actions dehors
L’espace thérapeutique à proposer pour les personnes souffrant d’éco-anxiété peut tout autant faire appel à des outils issus des TCC comme de l’EMDR notamment pour apaiser les troubles anxieux. Mais elle doit se faire dans le plus profond respect du ressenti, des peurs et des croyances qui s’y rattachent.
Il est important que la ou le psy choisi.e puisse aussi connaître la question de la collapsologie (étude d’un possible effondrement de la civilisation « thermo-industrielle » initiée par l’Institut Momentum, co-fondé par Yves Cochet et Agnès Sinaï. Ces derniers définissent l’effondrement comme « le processus irréversible à l’issue duquel les besoins de base (eau, alimentation, logement, habillement, énergie, etc.) ne sont plus fournis (à un coût raisonnable) à une majorité de la population par des services encadrés par la loi).
Pour autant, la thérapie aussi contenante soit elle doit s’associer à une mise en action.
L’individu surtout affecté par l’inaction alentours et sa propre impuissance peut mettre en œuvre des processus de réactivation en sortant du « non-faire » et entrant dans le « faire » de préférence de façon collective.
Les ateliers du Travail qui Relie créés par Joanna MACY sont de très belles occasions pour se relier avec d’autres personnes autour de ses émotions, projections et actions.
Je conseille particulièrement.
S’investir dans le cadre d’actions, d’associations, de militantismes sont tout autant de stimulations et de contenants bénéfiques psychiquement.
L’association La Bascule, GreenPeace etc. répondent à des besoins dans l’agir qui apaisent une part de sa souffrance de façon concrète.
Et vous ? Etes-vous éco-anxieuse ou éco-anxieux ? Faites le test !
Les références:
étude l’Eco-anxiété en France
Julie Donjon, référente santé mentale à l’Instance Régionale d’Education et de Promotion de la santé en Auvergne Rhône Alpes (IREPS-ARA):https://www.santementale.fr/2022/08/eco-anxiete-un-enjeu-de-sante-mentale/
Obs’COP 2023 observatoire international climat et opinions publiques. Etude menée par Ipsos en France du 16 août au 2 octobre 2023 auprès de de 29 pays, dont ceux qui émettent le plus de CO2, et un échantillon de 23 433 personnes représentatif de la population, âgées de 16 ans et plus de chacun des pays.